Face aux poncifs, aux clichés, aux idées toutes faites, diffusons le contraire de la pensée unique ! Adresse de contact : fal.roberty@skynet.be
Les « primaires » : un système inadéquat pour la gauche…
La révolte gronde à travers toute l’Europe, face aux programmes d’austérité à sens unique et aux plans du FMI. A Londres, à Paris, à Berlin, à Rome, les gouvernements s’agrippent sur des bases politiques de plus en plus fragiles. Voyons le cas français.
Lorsque De Gaulle instaura l’élection du chef de l’Etat au suffrage universel, en 1962, cette réforme, taillée sur mesure pour lui, allait faire désormais du président le pivot de toute la vie politique, dans la vieille tradition bonapartiste de la France. L’usage qu’a fait de la fonction Nicolas Sarkozy -jusqu’à la caricature- est unique en Europe occidentale. La longue parenthèse Mitterrand refermée, l’Elysée est devenu à nouveau un lieu comme inaccessible à la gauche. Pire : au sein du parti socialiste, les courants d’idées se sont affaiblis, se sont transformés en écuries de course pour la « présidentielle ». Même Arnaud Montebourg, héraut d’une « sixième République » a été réduit à ce jeu là.
La méthode des « primaires » pour désigner le principal candidat de la gauche, importée d’Italie où elle n’a produit que des déceptions, est-elle une bonne solution ? Ouverte à quiconque se voit électeur vers la gauche, sans être membre d’un parti, elle n’élimine pas les jeux d’appareil. Elle traduit en fait l’américanisation de la vie politique : aux Etats-Unis existent des « open primaries » qui mesurent la popularité des candidats. Le charisme personnel de ceux-ci, non leurs projets, devient l’élément essentiel. Les sondages font office de diktats. C’est la médiacratie.
Les « primaires » en France, pour le PS, opposeront et opposent déjà publiquement des candidats, ce qui n’est pas la meilleure manière de rassembler un large front de gauche pour battre Sarkozy. Rappelons qu’en 2002, Jospin a été éjecté au premier tour à cause de la fragmentation des suffrages : il y avait en tout dix-sept candidats en lice !
Qu’en est-il au seuil de 2011 ?
De Ségolène Royal, avec ses défauts et ses qualités, on ne peut dire qu’une chose : avoir échoué en 2007 la disqualifie. En Grande-Bretagne, le leader de parti qui est battu aux élections s’efface. L’hypothèque Strauss-Kahn, elle, pèse lourdement sur le PS : comme individu, on peut bien naturellement le préférer à un Sarkozy. Mais si on considère le Fonds monétaire international, qu’il dirige, et ce que sont les programmes du FMI appliqués à la Grèce, à l’Irlande, et ailleurs, il faut bien conclure que Sarkozy et DSK, c’est, pour reprendre un mot célèbre, bonnet blanc et blanc bonnet. Un tel candidat sous le drapeau du PS ne pourrait que diviser la gauche au second tour ! Le travail en profondeur de la première secrétaire Martine Aubry est autrement intéressant, avec une tentative de rénovation idéologique que n’offrent pas François Hollande ni, plus à droite encore, Manuel Valls.
A gauche du PS, Jean-Luc Mélanchon peut rassembler au premier tour, et son « populisme » est un bon antidote à celui de l’extrême droite.
En Allemagne, en France, en Italie, une social-démocratie qui parait à bout de souffle a quand même la chance, hors des « devoirs » de l’occupation du pouvoir, de pouvoir se mettre enfin en quête d’un programme et d’une perspective, autres que celle, débilitante, de « rassurer les marchés ». Poussées par les révoltes à la base des victimes de la crise financière et de la récession, les organisations syndicales tentent d’organiser une résistance : un front de gauche uni est un impératif.
Robert Falony.